Entre Lyon et la Réunion, l’interview de Floé

Entre Lyon et la Réunion, l’interview de Floé

Artiste peintre, graffeuse et graphiste, Floé vit sur l’île de la Réunion depuis presque 10 ans et est native de Lyon. Actuellement en résidence à Lyon au Fort Superposition grâce au Fonds d’aide aux Echanges Artistiques et Culturels de l’outre-mer (FEAC) sur le thème des femmes Réunionnaises. Son exposition est à retrouver au vernissage du 15 septembre à 18H à la Galerie Alcove, dans les pentes de notre chère Croix-Rousse (Lyon).

Pourquoi « Floe » ?
Tout simplement car je m’appelle Florence. J’ai pris le Flo du début, puis j’ai rajouté le e de la dernière lettre pour le rendre plus féminin.

Quand as tu commencé à peindre et où ?
Je dessine et je peins depuis que je suis marmaille. C’était mon passe temps favori. Puis j’ai commencé les fresques à Paris dans les années 2000 en rencontrant d’autres graffeurs. J’ai expérimenté la spray avant de lâcher l’affaire. Par la suite je faisais les fresques au rouleau et pinceau. Les sprays j’ai repris il y a un an seulement. L’une de mes premières fresques à la spray c’était à l’Urban Art Jungle Festival en 2019 d’ailleurs !

C’est quoi ton style et tes sujets de prédilection ?
Mon style est très pop et coloré. J’ai une formation de graphiste donc la courbe est super importante pour moi. Mon sujet de prédilection c’est les femmes. Qui s’assument, avec leur défaut. tout l’inverse de la femme dans la publicité, même si ça change ces derniers temps car les femmes prennent une place plus importantes dans la société et qu’elles se défendent. Y’a de plus en plus de femmes qui dirigent. J’ai ce côté féministe mais ce n’est pas pour ça que je suis contre les hommes au contraire. Plutôt avec eux. Je veux montrer la femme naturelle, sauvage, qui assume ses défauts, qui est bien dans sa peau, belle en étant elle-même.

Floé en préparation de son exposition – © Photo Jeanne Bonnin

Pourquoi ça te tient à cœur ?
Ca me tient vraiment à cœur car j’ai souffert de ça. Le côté mince, jeune, lisse en quelque sorte. Quand t’es gamine c’est dur. Maintenant je défend ça. Je suis contente que les gamines puissent grandir sans ces règles. Les poils, la cellulite, même les tâches de rousseur qui étaient mal vue à un moment. Les roux aussi, alors que maintenant c’est carrément accepté. Je trouve ça puissant qu’on puisse évoluer avec notre propre caractère. Les gens vont avoir chacun leur identité, c’est hyper créatif. Un melting pot de fou. On ne se ressemble pas tous.

Dans tes oeuvres, on peut percevoir une certaine notion d’espace, ça représente quoi pour toi ?
C’est le coté recroquevillé sur soi, des femmes qui ont envie d’exploser. On a toujours voulu nous mettre dans des cases. Elles arrivent à s’adapter à la forme dans lequel je peins, même si elles sont un peu coincées elles s’adaptent à l’environnement. Je m’adapte au support. Si j’ai un mur tarabiscoté je vais faire une femme qui suit la forme. Ca me fait une contrainte, un challenge. Y’a un coté positif d’être replié sur soi, d’être bien avec soi et se connaitre soi-même. Le côté vraiment maternel, des formes généreuses très accentuées.

Quelles sont tes inspirations artistiques ou au quotidien ?
Au quotidien ? Vraiment, les femmes. Dans mes potes, dans des artistes, des femmes battantes et qui, comme mes personnages, s’assument. C’est pour ça que j’ai travaillé sur ses 8 portraits (photographies accrochées sur le mur de l’atelier de Floé, représentant chacun une femme, N.D.L.R) qui sont des amies. Que j’admire pour plein de raisons différentes. Je redessine et j’interprète de manières différentes. C’est puissant. J’aime bien le côté brute, pratiquement sans retouches, où l’on voit les cicatrices, les vergetures, les boutons et autres. C’est ça qui rend beau. Pas que ça, mais des femmes naturelles qui s’assument, c’est beau.

C’est quoi tes tics artistiques, qui reviennent souvent ?
Les tâches de rousseur et les poils. Et le travail des cheveux. En ce moment la végétation également, en rapport avec La Réunion. Tout pousse très vite là bas, tu es vite envahie ce qui est positif.

Tu es ici car tu as un projet, soutenu par Lerka à la Réunion, tu peux nous en parler ?
Lerka est un espace de recherche et de création en arts actuels. C’est une association qui s’occupe d’artiste. Ils m’ont soutenu pour ma future exposition.

Fresque de Floé au Fort Superposition en 2019 – © Photo Jonzo Johan

Un petit mot sur ton exposition à Lyon ?
L’exposition se déroule à la Galerie Alcove dans les pentes de la Croix-Rousse, durant 10 jours du 14 au 24 septembre. Le vernissage c’est le 15 à 18H. Merci Superposition de me prêter un lieu pour travailler, de rencontrer des gens en résidence qui sont géniaux. Le level est haut, tout le monde est professionnel. Merci à beaucoup de monde pour cette exposition, c’est génial d’avoir des personnes qui me soutiennent.

C’est quoi ta relation avec Superposition ?
J’avais fais un partenariat avec Secoa skateboard (marque de skate) aux terreaux. C’est Stéphanie qui bossait à Superposition à l’époque qui m’avait contacté et proposé de venir faire une exposition collective, Métamorphe, et de participer à l’Urban Art Jungle #5. Je suis fan de votre association, vous avez un choix d’artistes ciblés et talentueux. C’est important même si je débute dans le milieu. Finalement ça ne fait que 1 an que je ne suis « que » artiste. Ça serait cool que vous veniez à La Réunion !

Tu veux nous parler de ta dernière fresque ?
Ma dernière fresque c’était au Leclerc de la Réunion. C’est une fresque de 8 mètres par 7 mètres environ dans un supermarché. Ca a duré 4 jours, j’ai aimé l’interaction, être dans un lieu si populaire. Le graff c’est populaire car on est dans la rue mais là c’était moins ciblé. J’entendais des gens rentrer dans le supermarché pour faire leurs courses et être impressionné du volume, impressionné que ce soit dans un supermarché. C’est un nouveau projet avec Le Fonds Réunion des Talents , une association qui promeut les artistes à la Réunion.

Fresque De Floé au Leclerc de la Réunion
La femme végétale par Floé © Photo Lionel Ghighi

Ils ont fait appel à des artistes pour faire des fresques dans des endroits différents et populaires. J’ai fais une fresque qui s’appelle « Femme Végétale ». C’était une belle experience humaine. J’ai peins avec un autre artiste qui s’appelle Repi. Lui ça fait 1 an qu’il est là, il a un level de fou. Il m’a même aidé pour le côté technique. A chaque fois que je peins avec d’autres graffeurs, ils me donnent plein de techniques, comme Loodz à l’Urban Art Jungle.

C’est quoi ton projet le plus marquant ?
Ma plus grande fresque, à Porlwi. J’ai eu que des galères mais en même temps c’était génial. Je peignais au rouleau et au pinceau. On a eu une pluie tropicale alors que je venais de faire les cheveux. Tous les cheveux ont coulé sur la fresque. J’ai quand même réussi à la finir dans les temps avec des amis qui m’aidaient. En plus je ne peignais que la nuit pendant le festival et les concerts. C’était émotionnel. En 2016.

Mur de Floé au festival Porlwi à l’île Maurice

C’est quoi tes projets à venir ?
L’exposition à la Galerie Alcove, puis une autre exposition solo sur les femmes réunionnaises avec la galerie Opus Art. Ca devrait être exposé dans un musée, Stella Matutina . J’ai aussi une fresque pour un particulier puis j’ai répondu à des appels d’offre. Et avec la ville de Saint Paul, une grande fresque. Plus tu fais de truc, plus t’as de projet.

Et pour finir, tu les vois comment les femmes du futur ?
La femme du futur je la vois un peu comme les femmes maintenant. Nature et qui s’assume, qui soit elle-même.


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