L’interview de Tarek, entre Paris Tonkar et masques anthropomorphiques

L’interview de Tarek, entre Paris Tonkar et masques anthropomorphiques

Pourquoi Tarek ?
C’est mon prénom, tout simplement. Je suis scénariste de bande dessinée depuis plus de vingt ans et, dans ce média, on t’appelle souvent par ton nom d’où le choix de Tarek afin d’éviter d’avoir celui-ci massacré car difficilement prononçable. Je me suis dit que si c’était pour m’appeler par mon nom de famille (ou quelque chose s’en rapprochant) à longueur de journée, cela risquait de me fatiguer rapidement. Très tôt, j’ai décidé d’utiliser mon prénom pour l’art en général.

Quand as tu commencé à peindre ?
J’ai commencé le graffiti fin 85 et j’ai participé à ma première exposition avec d’autres peintres en 1992 lors de « Paris Graffiti », rue Chapon dans le Marais. On était vingt à exposer : il y avait dix Américains et dix Français. C’était la première exposition consacrée au graffiti sur toile organisée en France. J’étais à la fois un des artistes exposés et l’un des curateurs : cet événement était, en outre, lié à la sortie de mon livre Paris Tonkar. J’oubliais de dire que j’avais commencé la peinture sur toile en 1990.

Qu’est ce qui t’a donné envie de sortir ce livre Paris Tonkar ?
Un soir, on était dans le métro, sur la ligne 10, au niveau de Boulogne-Billancourt. On était en train de taguer dans la station les rames qui passaient et la station. À un moment, j’ai réalisé qu’il n’y avait aucun témoin de ce qu’on était en train de faire. A partir de cette folle soirée, l’idée d’écrire un livre sur le graffiti parisien a germé. J’ai commencé à travailler dessus assez vite ensuite, vers 1988.

Comment es-tu passé du livre aux magazines Paris Tonkar ?
En 2010, j’avais envie de ressortir mon bouquin indisponible depuis 1998 : j’en ai parlé avec Yann, le directeur de publication, qui travaille dans la presse. En discutant longuement sur la réédition du livre, il a réussi à me convaincre qu’il serait opportun de sortir un magazine sur le graffiti pour ouvrir une fenêtre de liberté pour cet art très vivant. L’aventure éditoriale a donc commencé ainsi.

C’est quoi ton style et tes sujets de prédilection ?
Je suis influencé par la bande dessinée, le pop art, la calligraphie… Par beaucoup de choses très différentes finalement ! Le cubisme, j’adore aussi, tout comme la peinture géométrique, l’art tribal et les arts primitifs. C’est un tout qui donne des inspirations très variées.

Tarek et fresque à la spray
Tarek à l’oeuvre dans les couloirs du Fort – © Lionel Rault

Tu représentes souvent des masques dans tes oeuvres. Ça représente quoi pour toi ?
On a tous des masques à longueur de journée. J’aime bien travailler sur l’idée du masque, un sujet que j’explore depuis très longtemps même en bande dessinée. Je crée mes propres masques aussi. Je mélange souvent cela avec les vanités, que j’apprécie tout particulièrement. En ce moment je suis sur une nouvelle série, avec des masques anthropomorphiques, zoomorphiques et des totems.

C’est quoi ton tic artistique ?
J’adore les couleurs chaudes, ce qui revient souvent d’après les retours de ceux qui découvrent ou achètent mon art. Il y a beaucoup de gens qui me disent que j’ai un style très personnel et joyeux. J’aime à penser que c’est vrai.

Ton histoire avec Superposition ?
J’ai fait une exposition et j’ai peint une rue entière avec Superposition à l’époque où la galerie était située rue Longue. Le feeling est super bien passé avec l’équipe. Dès lors, je suis intervenu sur plusieurs projets initiés par la galerie. J’ai pu investir des murs lors de la grande exposition collective One Shot. Je suis venu peu après pour peindre à l’Urban Art jungle Festival. Je reviens très régulièrement à Lyon pour peindre des murs, apporter de nouvelles œuvres et passer du temps avec l’équipe.

Fresque de Tarek à l’Urban Art Jungle Festival à Lyon

Quelles sont tes inspirations, artistique ou au quotidien ?
Tout m’inspire, il n’y a pas de limite. Être artiste, c’est avoir de nombreux coups de cœur dans les arts en général. Je ne vais pas donner de noms d’artistes actuels mais je dirais Picasso, c’est de loin le peintre qui me parle le plus. Il a travaillé toute sa vie : au moment où on l’attendait quelque part il allait ailleurs. Il a toujours expérimenté tout en affirmant son art. Il a toujours progressé et a laissé un grand patrimoine pictural, plus de 47.000 œuvres. En regardant de près son parcours, on se rend compte qu’il a tout fait. Il a peint sur de nombreux supports différents à chaque période de sa vie d’artiste et il a utilisé les moyens de communication de son époque. Quand la télé devient un vecteur, un médium, il l’utilise. Il a tout compris. Il ne s’est pas enfermé.

Et toi c’est quoi ton rapport aux moyens de communication de notre époque, comme les réseaux sociaux ?
Sur les réseaux sociaux je mets beaucoup de news et d’images, je trouve cela important de partager. L’art, c’est le partage. Les réseaux sociaux, par définition, sont des endroits où on parle comme dans une agora. J’aime montrer plein de choses différentes, cela permet aussi à de plus jeunes créateurs d’avoir des idées ou peut-être même de me contacter s’ils ont des projets.

Et le magazine Paris Tonkar pendant le confinement, c’était comment ?
Les imprimeurs étaient fermés donc c’était en stand-by. Le magazine était terminé mais il est parti en presse trois mois plus tard. C’était compliqué mais ça va.

Tu veux nous parler du dernier numéro ?
Le dernier opus consacre un portrait Rasko, qui entre autres exploits a peint plus de 2 000 trains. C’est un numéro qui traite du graffiti russe que les gens ne connaissent pas tellement.

Couverture du magazine Paris Tonkar
Couverture de Paris Tonkar numéro 20 – Train par Rasko

C’est quoi tes projets à venir ?
Ma prochaine exposition est un solo-show à Paris en octobre dans la Galerie Kykart puis en fin d’année une exposition consacrée au club de rugby le Stade français, avec la We need art galerie. Il y a plusieurs projets en discussion, mais à confirmer vu le contexte actuel.

Tarek était au Fort Superposition à Lyon durant trois jours , sa fresque est à découvrir lors des Journées Européennes du Patrimoine le 19 et 20 septembre.

Instagram : @tarekby


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